- LANDOLFI (T.)
- LANDOLFI (T.)LANDOLFI TOMMASO (1908-1979)Né à Pico Farnese (Latium), descendant d’une famille de la noblesse, «rat de bibliothèques et pilier de tripots», proche des milieux de l’hermétisme florentin, Tommaso Landolfi est par bien des côtés une figure atypique dans le paysage littéraire italien. D’une immense culture, il a traduit Pouchkine, Gogol, Dostoïevski, Nodier, Hofmannsthal. Dès ses premières narrations, il se distingue par une écriture de l’excès qui se souvient de ses grands modèles: les romantiques allemands, Baudelaire et Poe, Gogol, Pouchkine et Kafka: La Pierre de lune (La Pietra lunare , 1939), Les Deux Vieilles Filles (Le Due Zitelle , 1946), Racconto d’autunno (La Jeune fille et le fugitif , 1947). Autant de récits inquiétants, proches de la fable et du mythe, parfois, où l’art du pastiche fait bon ménage avec la passion du bizarre. Son abondante production confirme son exigence d’utiliser toujours davantage une langue des plus élaborées; ses divertissements et ses inventions stylistiques révèlent des obsessions inconscientes, en particulier dans La Biere du pecheur (1953), où le double sens du titre, volontairement transcrit en français par Landolfi, signifie à la fois peur de la mort et nécessité d’adopter un langage capable d’assumer un dialogue entre la raison et l’instinct, entre le conscient et l’inconscient. Ce livre marque un tournant dans l’œuvre de Landolfi. Si celui-ci continue de publier de remarquables récits (Ombre , 1954, qui contient un de ses textes les plus fameux: La Femme de Gogol ; Racconti , 1961; Racconti impossibili , 1966), il s’oriente également vers une écriture plus autobiographique, proche du journal, où sa mélancolie, ses obsessions, sa manie du jeu — la roulette en l’occurrence — trouvent pleinement à se dire. Comme La Biere du pecheur , les titres suivants seront, eux aussi, en français: Rien va (1963), Des mois (1967).Landolfi ne se contente pas de raconter des histoires: sa langue est une pulsation dont l’exceptionnelle créativité le situe plutôt dans la perspective de C. E. Gadda, à un moment où le réalisme et la littérature militante apportent à la culture italienne une incontestable contribution mais aussi de graves déceptions. Au «rigorisme» de ce versant de la littérature italienne, Landolfi oppose en effet une fantaisie morbide, une passion pour le génie du lieu dignes du roman noir.
Encyclopédie Universelle. 2012.